Sgiò Presidente di l’esecutivu,
Signore è signori cunsigleri esecutivi
Signore è signori i cunsiglieri à l’Assemblea di Corsica.
Care tutte, cari tutti.
Oghje semu in prisenza d’una classa di u liceu agriculu di u Borgu, chì, l’avemu dicisu eri in cumissione permanente s’hà da chjamà Campus Corsic’Agri Borgu Marana, giunavotti è giuvanotte chì anu da seguità a nostra sessione dipoi e tribune. Ci face assai piacè di sicura d’accoglie li.
Vous avez fait le choix d’une filière noble, très belle qui va vous lier à la terre. Vous l’avez entendu, un réchauffement climatique, des questions de dépendance alimentaire qui se posent et je pense et je vous souhaite de faire des carrières magnifiques dans ces domaines-là.
Je tiens également à saluer la promotion des administrateurs territoriaux stagiaires de l’INEC qui sont à la collectivité, qui nous écoutent et qui suivront nos débats. Il s’agit de la promotion Gisèle Halimi, tout un symbole.
Signore è signori cunsigleri esecutivi
Signore è signori i cunsiglieri à l’Assemblea di Corsica.
Care tutte, cari tutti.
Oghje semu in prisenza d’una classa di u liceu agriculu di u Borgu, chì, l’avemu dicisu eri in cumissione permanente s’hà da chjamà Campus Corsic’Agri Borgu Marana, giunavotti è giuvanotte chì anu da seguità a nostra sessione dipoi e tribune. Ci face assai piacè di sicura d’accoglie li.
Vous avez fait le choix d’une filière noble, très belle qui va vous lier à la terre. Vous l’avez entendu, un réchauffement climatique, des questions de dépendance alimentaire qui se posent et je pense et je vous souhaite de faire des carrières magnifiques dans ces domaines-là.
Je tiens également à saluer la promotion des administrateurs territoriaux stagiaires de l’INEC qui sont à la collectivité, qui nous écoutent et qui suivront nos débats. Il s’agit de la promotion Gisèle Halimi, tout un symbole.
Allora, sta sessione hè appena anticipata in u mese postu chè semu u diciottu è chì hè dedicata à u sugettu impurtante è tecnicu ch’hè u bugettu supplementariu di u 2021.
Oghje, hè ancu di più tecnicu è forse ancu più puliticu chì, cum’è ognunu a sà, a culletività hè stata cundannata à pagà 88 millioni d’euri per l’affaru di a DSP Marittima di l’anni 2004-2010. Ognunu a saperà dinò, chì l’esecutivu hà fattu a scelta d’ùn iscrive micca sta spesa à u bugettu.
L’attribution de cette DSP a été jugée illégale. Il n’est pas aujourd’hui question de le nier. Oui il y a eu faute. Mais qui l’a commise ?
Pas l’Etat selon l’avis rendu par la justice… Etat qui pourtant n’a visiblement pas exercé le contrôle de légalité qui s’imposait. Etat qui à l’époque créait des distorsions de concurrence en faisant suréquiper la SNCM. Etat qui ne notifiait pas la DSP à la Commission européenne. C’est aussi l’Etat qui a inspiré et voulu le service complémentaire :
J’ai lu aussi les interviews dans les heures récentes du Président de l’exécutif et de certains d’entre vous, et je vous rejoins : cette dette n’est pas celle de la Collectivité, cette dette n’est pas celle des Corses ! La responsabilité financière et morale de cette dette incombe à l’Etat. Etat coupable au mieux d’incompétence, au pire de connivence et de malversations…
Et je soutiens sans réserve la non-inscription au budget supplémentaire des 88 millions d’euros, bien plus d’ailleurs au moment où nous parlons, qui permettraient d’apurer cette dette, car reconnaître cette dette, c’est d’abord considérer nous-mêmes que nous sommes coupables et fautifs, et que nous avons un devoir de remboursement.
Nous savons tous ce qu’est une dette : une relation de dépendance très forte, presque interpersonnelle, entre un créancier et un débiteur. Mais au-delà de la comptabilité, au-delà de la science budgétaire et des propositions de « paiement en 4 fois » non pas sans frais, mais avec frais. Au-delà de ces éléments chiffrés que nous aurons examinés tout à l’heure, permettez que j’apporte un élément nouveau à l’analyse de la manière dont l’Etat traite la Corse et les Corses selon moi.
Pour cela je suis allée puiser dans un très bel article consacré à l’éthique de la dette et de ses liens essentiels avec la faute et avec le devoir, rédigé en 1997 par la philosophe Nathalie Sarthou-Lajus * Elle dit : « La dépendance du sujet débiteur à l’endroit d’une autorité extérieure suppose qu’il n’est pas en mesure de se donner la loi à lui-même. » …
« Qu’il n’est pas en mesure de se donner la loi à lui-même ! » c’est-à-dire qu’il n’est pas capable de se gouverner. Qu’il n’est pas responsable.
Ainsi l’Etat, en laissant exécuter cette délégation de service public, a certes causé un préjudice à la Corsica Ferries. Puis par un machiavélique truchement, cherche à nous faire porter collectivement le poids de la culpabilité dont découle mécaniquement le devoir de réparation. Ce qui ne manquera pas assurément de convaincre certains d’entre nous, que nous, les Corses, serions incompétents dans la conduite des affaires publiques puisque désormais débiteurs que nous sommes nous ne serions pas en mesure de nous donner la loi à nous-même.
Enfin, et j’en termine, la philosophe poursuit : « La dette remet en question le principe de suffisance du sujet, son autonomie » (Sarthou Lajus, 1997). En nous transférant donc le poids de cette dette immense équivalente à une année et demie de dotations pour nos communes, à sept ans de recherche scientifique et de pédagogie à l’Université de Corse, et je pourrais multiplier les exemples d’équivalence de cette dette. En plus de se laver les mains de sa culpabilité, l’Etat remet en question nos aptitudes et notre autonomie.
En tant qu’économiste sachant combien les mécanismes de l’asservissement moral et de la dépendance économique se sont entretenus dans l’histoire des relations centre-périphérie des territoires insulaires, je ne souhaiterai jamais que nous demandions l’aumône, ou que nous sollicitions un douteux aménagement de dette pour régler nos éventuelles factures litigieuses. L’autonomie, la responsabilité et l’émancipation sont à ce prix.
Mais, dans le cas d’espèce, concernant la faute originelle à l’encontre de la Corsica Ferries, comme pour toutes les fautes qui s’en sont suivies, nous devons tout simplement demander à l’Etat qu’il paie ses propres dettes !
A ringrazzià vi
* Nathalie Sarthou-Lajus « La dette, le devoir, la faute » in L’éthique de la dette, 1997, pp.95-112.
Oghje, hè ancu di più tecnicu è forse ancu più puliticu chì, cum’è ognunu a sà, a culletività hè stata cundannata à pagà 88 millioni d’euri per l’affaru di a DSP Marittima di l’anni 2004-2010. Ognunu a saperà dinò, chì l’esecutivu hà fattu a scelta d’ùn iscrive micca sta spesa à u bugettu.
L’attribution de cette DSP a été jugée illégale. Il n’est pas aujourd’hui question de le nier. Oui il y a eu faute. Mais qui l’a commise ?
Pas l’Etat selon l’avis rendu par la justice… Etat qui pourtant n’a visiblement pas exercé le contrôle de légalité qui s’imposait. Etat qui à l’époque créait des distorsions de concurrence en faisant suréquiper la SNCM. Etat qui ne notifiait pas la DSP à la Commission européenne. C’est aussi l’Etat qui a inspiré et voulu le service complémentaire :
- Pour financer la commande d’un navire et faire travailler ainsi les chantiers navals de Saint Nazaire
- Pour acheter la paix sociale sur le port de Marseille
- Pour maintenir artificiellement la SCNM dont il était l’actionnaire principal.
J’ai lu aussi les interviews dans les heures récentes du Président de l’exécutif et de certains d’entre vous, et je vous rejoins : cette dette n’est pas celle de la Collectivité, cette dette n’est pas celle des Corses ! La responsabilité financière et morale de cette dette incombe à l’Etat. Etat coupable au mieux d’incompétence, au pire de connivence et de malversations…
Et je soutiens sans réserve la non-inscription au budget supplémentaire des 88 millions d’euros, bien plus d’ailleurs au moment où nous parlons, qui permettraient d’apurer cette dette, car reconnaître cette dette, c’est d’abord considérer nous-mêmes que nous sommes coupables et fautifs, et que nous avons un devoir de remboursement.
Nous savons tous ce qu’est une dette : une relation de dépendance très forte, presque interpersonnelle, entre un créancier et un débiteur. Mais au-delà de la comptabilité, au-delà de la science budgétaire et des propositions de « paiement en 4 fois » non pas sans frais, mais avec frais. Au-delà de ces éléments chiffrés que nous aurons examinés tout à l’heure, permettez que j’apporte un élément nouveau à l’analyse de la manière dont l’Etat traite la Corse et les Corses selon moi.
Pour cela je suis allée puiser dans un très bel article consacré à l’éthique de la dette et de ses liens essentiels avec la faute et avec le devoir, rédigé en 1997 par la philosophe Nathalie Sarthou-Lajus * Elle dit : « La dépendance du sujet débiteur à l’endroit d’une autorité extérieure suppose qu’il n’est pas en mesure de se donner la loi à lui-même. » …
« Qu’il n’est pas en mesure de se donner la loi à lui-même ! » c’est-à-dire qu’il n’est pas capable de se gouverner. Qu’il n’est pas responsable.
Ainsi l’Etat, en laissant exécuter cette délégation de service public, a certes causé un préjudice à la Corsica Ferries. Puis par un machiavélique truchement, cherche à nous faire porter collectivement le poids de la culpabilité dont découle mécaniquement le devoir de réparation. Ce qui ne manquera pas assurément de convaincre certains d’entre nous, que nous, les Corses, serions incompétents dans la conduite des affaires publiques puisque désormais débiteurs que nous sommes nous ne serions pas en mesure de nous donner la loi à nous-même.
Enfin, et j’en termine, la philosophe poursuit : « La dette remet en question le principe de suffisance du sujet, son autonomie » (Sarthou Lajus, 1997). En nous transférant donc le poids de cette dette immense équivalente à une année et demie de dotations pour nos communes, à sept ans de recherche scientifique et de pédagogie à l’Université de Corse, et je pourrais multiplier les exemples d’équivalence de cette dette. En plus de se laver les mains de sa culpabilité, l’Etat remet en question nos aptitudes et notre autonomie.
En tant qu’économiste sachant combien les mécanismes de l’asservissement moral et de la dépendance économique se sont entretenus dans l’histoire des relations centre-périphérie des territoires insulaires, je ne souhaiterai jamais que nous demandions l’aumône, ou que nous sollicitions un douteux aménagement de dette pour régler nos éventuelles factures litigieuses. L’autonomie, la responsabilité et l’émancipation sont à ce prix.
Mais, dans le cas d’espèce, concernant la faute originelle à l’encontre de la Corsica Ferries, comme pour toutes les fautes qui s’en sont suivies, nous devons tout simplement demander à l’Etat qu’il paie ses propres dettes !
A ringrazzià vi
* Nathalie Sarthou-Lajus « La dette, le devoir, la faute » in L’éthique de la dette, 1997, pp.95-112.
* Seul le prononcé fait foi