Rapport présenté
Avis du CESECC
Les dérives mafieuses en Corse se sont intensifiées au fil des décennies, culminant en une série d'actes criminels et d'assassinats impunis. L'assassinat de Massimu Susini en 2019 a déclenché une réaction citoyenne, menant à la création de collectifs antimafia et à une mobilisation pour une réponse collective.
Le Président du Conseil exécutif de Corse a prononcé un discours en 2019, soulignant le risque de convergence entre criminalité organisée et institutions politiques et appelant à une action collective pour contrer ces dérives.
Une session spéciale de l'Assemblée de Corse dédiée aux dérives mafieuses a été organisée le 18 novembre 2022, débouchant sur une résolution solennelle affirmant la volonté de vivre dans une société libre et démocratique.
En application de cette résolution, la Commission Permanente de l’Assemblée de Corse a été réunie, dans un format dédié, élargi aux Présidents des groupes politiques, aux instances consultatives et à des représentants des collectifs et associations, pour mener un cycle d’auditions.
En complément de ces auditions, des ateliers de travail ont été engagés, organisés autour de cinq thèmes, selon une logique prévoyant la réalisation d’un état des lieux, l’identification de problématiques, la réalisation d’auditions et d’approfondissements, l’élaboration d’un livrable de synthèse.
Le conseil exécutif de Corse, par ce rapport, propose un plan d’action global composé de trente mesures, réparties en cinq thématiques, dans des domaines relevant de ses compétences propres, de compétences partagées, ou ne relevant pas de ses compétences au terme du droit positif actuel.
Certaines propositions sont déjà en vigueur, d’autres peuvent intervenir sans délai sous réserve d’un vote favorable de l’Assemblée de Corse, les dernières ont vocation à être mises en œuvre ou expertisées et affinées dans le cadre de la poursuite des travaux.
L’objectif poursuivi et proposé est clair : construire une société corse démocratique, composée de femmes et d’hommes libres, vivant et travaillant en paix dans le pays qui est le leur.
Le CESEC de Corse, en tant que représentant de la société civile se félicite de constater qu’une mobilisation citoyenne organisée et pérenne s’est constituée contre la violence à caractère mafieux et trouve écho au sein de la société, des élus et des institutions.
Le CESEC de Corse loue le travail de la Collectivité de Corse qui a su prendre en compte un problème prégnant pour la société corse, salue cette initiative qui est sans équivalent (hormis en Sicile) et qui mobilise les institutions et l’ensemble du corps social.
La lutte contre les dérives mafieuses exige en effet un engagement et un investissement significatifs de la part de tous.
Le CESEC de Corse souhaite réaffirmer son engagement indéfectible pour contribuer à construire une société libre, démocratique et apaisée.
Le CESEC de Corse affirme également que pour permettre d’enrayer la criminalité organisée et ses violences, exercées par des groupes quels qu’ils soient relevant de la grande criminalité ou non, un développement économique et social, durable, juste et solidaire, où chacun trouve sa place, est une condition nécessaire, et son corollaire indispensable et primordial est le renforcement de la prévention, de l’éducation, de la formation et de la culture sans lesquels il n’existe pas de personnes émancipées, sensibilisées aux enjeux de la citoyenneté, des droits humains et des libertés fondamentales.
Le CESEC de Corse rappelle avoir pris une part importante dans la démarche initiée, à côté de la collectivité de Corse. Tout d'abord, en adoptant, en décembre 2022, une résolution relative aux dérives mafieuses qui affligent l'île, puis en participant activement aux travaux organisés dans les cinq ateliers mis en place par l’Assemblée de Corse.
L’adoption de ce rapport, loin d’être perçu comme un moment d’opportunité, marquera le début d’une mobilisation active et collective, qui s’inscrira dans le temps long avec le concours de tous, qui soit à la fois convaincante et réaliste, visant à surmonter le sentiment de fatalisme et de résignation qui pourrait habiter le peuple corse.
À la lumière des remarques et observations formulées lors de l’analyse des propositions présentées, le CESEC de Corse réaffirme avec force sa volonté de s'engager dans cette dynamique de co-construction d’un pays, d’un projet de société fondé sur des valeurs de liberté et de justice, voué à l’émancipation individuelle et collective et souhaite être étroitement associé aux travaux qui seront entrepris.
I : Éthique et politiques publiques
Les propositions portées par le Conseil exécutif de Corse
-Actions menées dans le cadre du contrôle des opérateurs externes et l’évaluation des politiques publiques
La lutte contre la mafia est un combat pour l’éthique et la transparence, une clé essentielle pour redonner confiance aux citoyens. Le CESEC de Corse salue les efforts réalisés dans ce domaine par la direction dédiée.
-Actions menées dans la cadre du contrôle interne
Le CESEC de Corse, consulté sur la stratégie d’achat public de la collectivité de Corse, a eu l’occasion de se prononcer sur les actions proposées.
En 2022, avec le Corsica Business Act et le schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER) 2023-2027, le CESEC saluait les bonnes intentions émanant de la collectivité, visant à faire de la commande publique un levier de dynamisation du tissu économique et un moteur de croissance pour les entreprises corses, tout en respectant scrupuleusement les règles de la commande publique. Il jugeait également utile et opportun d’accroître la visibilité et l’éthique de la commande publique, et d’allouer les moyens nécessaires pour en garantir le respect.
En 2024, lors de la révision du SPASER, le CESEC constatait les efforts accomplis et les données encourageantes concernant l’insertion des clauses sociales et environnementales, ainsi que les mesures facilitant l’accès à la commande publique pour les TPE/PME.
Le CESEC soulignait l’importance d’associer, au processus consultatif mis en place, les différentes organisations professionnelles, ainsi que, dans le cadre de l’ESS, l’Union des Employeurs de l’Économie Sociale et Solidaire (UDES). Il a également insisté sur la nécessité d’intégrer la démarche de « Responsabilité Sociétale des Entreprises », afin que les entreprises influencent positivement leur environnement interne et externe.
Le CESEC de Corse souligne l’importance de cette initiative.
Le CESEC de Corse entend que l’instance consultative spécifique, dont la création est proposée, permettra de recueillir et de traiter les alertes. Toutefois, il souhaite qu’une attention particulière soit accordée aux agents de la collectivité de Corse. Cela pourrait passer par des actions de formation, de sensibilisation et par le renforcement des moyens de protection, afin de les soutenir efficacement en cas de situation de signalement.
Le CESEC de Corse salue cette initiative et considère comme tout aussi déterminante toute autre perspective permettant de renforcer la participation citoyenne, notamment à travers des consultations citoyennes. Il est également crucial d'améliorer le niveau de conscience collective des responsabilités et des devoirs de chacun. Pour ce faire, il convient de réfléchir aux modalités de participation des citoyens à l’élaboration des politiques publiques à l’échelle des territoires, afin de renforcer la participation citoyenne et la vigilance collective (forums de discussion, consultations publiques, les campagnes de sensibilisation…)
Le CESEC de Corse juge essentiel que le Conseil exécutif de Corse suscite l’aide de l’AFA pour marquer sa volonté de s’engager dans une démarche anticorruption.
Le CESEC de Corse considère que toute initiative qui permet d’améliorer l’information des citoyens est essentielle car de nature à mieux mesurer l’ampleur du phénomène et à adapter éventuellement les dispositifs mis en place.
II : Secteurs économiques particulièrement exposés
Le CESEC de Corse tient à souligner que, bien que certains secteurs d'activités soient particulièrement vulnérables aux dérives mafieuses, cela ne signifie pas que tous les acteurs économiques impliqués dans ces secteurs soient malhonnêtes. De nombreux entrepreneurs et travailleurs s’investissent avec probité et intégrité dans ces domaines, contribuant ainsi au développement économique et social de la région.
Ces acteurs économiques, par leur engagement et leur travail, jouent un rôle crucial dans la lutte contre les dérives mafieuses. Ils démontrent qu'il est possible de réussir et de prospérer sans recourir à des pratiques illégales. Il est donc essentiel de les soutenir, de les valoriser et de les protéger de toute pression ou destruction émanant de la sphère des bandes organisées afin de renforcer le tissu économique local et de promouvoir des modèles de réussite basés sur le respect des lois.
En reconnaissant et en encourageant ces efforts, nous pouvons créer un environnement où les activités mafieuses sont marginalisées et où les valeurs de travail et d'intégrité sont mises en avant. Cela contribuera à bâtir une société plus juste et plus résiliente, capable de résister aux tentations criminelles et de prospérer de manière durable.
Propositions portées par le conseil exécutif de Corse
Le CESEC de Corse s’est prononcé sur la problématique déchet par un rapport d’auto saisine « Femu altrimente, contribution pour une gestion vertueuse et pratique des déchets ». Il rappelle son avis sur le PTPGD : il considère que si la notion de bénéfice raisonnable est vertueuse et de nature à limiter les profits, elle ne suffit pas néanmoins à soustraire la gestion des déchets à la seule logique du profit. Cette gestion doit impérativement s’accompagner d’un renforcement du tri à la source et de l’installation d’infrastructures de proximité, tel que cela est prévu dans le PTPGD.
Le CESEC de Corse soutient cette proposition. Par délibération, l’Assemblée de Corse a donné pouvoir au président du Conseil exécutif de Corse d’ester en justice sur les permis de construire et les documents d’urbanisme illégaux. Néanmoins, c’est la fonction régalienne de l’Etat que d’assurer un contrôle de légalité dans ce domaine ; la Collectivité de Corse veille, pour sa part, à la compatibilité de ces actes au PADDUC.
Le CESEC de Corse souhaite que l'État réponde favorablement à cette proposition de gestion partagée, cela permettra d'obtenir une vision complète des demandes de permis de construire, de disposer de capacités d'action, y compris en phase précontentieuse, voire de permettre à la collectivité de Corse d’avoir les éléments d'ester en justice dans les délais prévus aux côtés de l'État ou seule, si ce dernier ne souhaitait pas s'engager dans une telle démarche.
Il est rappelé à la mémoire du CESEC qu'en 2019, l'État n'avait pas donné suite à cette demande. Aussi, le CESEC de Corse s'interroge sur les conséquences d'un éventuel refus réitéré, et en particulier sur ce qui peut être envisagé dans ce cas au sein de la collectivité de Corse, notamment dans le cadre du suivi et de l’application du PADDUC. Le CESEC de Corse juge nécessaire la mise en place d'une instance de suivi de l'application des lois en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire sachant que le secteur de l’immobilier est exposé à des pratiques spéculatives qui peuvent entraîner des comportements mafieux.
Le CESEC de Corse reconnaît la nécessité de construire une relation apaisée avec l'État, les institutions et le corps social. La réponse de l'État à la création d'une instance conjointe telle que proposée sera un indicateur précieux pour évaluer ce niveau de confiance.
Le CESEC de Corse rappelle qu'à plusieurs reprises, dans ses avis, il a insisté sur la nécessité d'accorder une attention particulière à l'élaboration des documents d'urbanisme. Il préconisait également que les aides accordées aux communes et à leurs groupements soient conditionnées à l'adoption de ces documents.
Le CESEC de Corse partage le constat selon lequel le phénomène spéculatif se déplace vers les zones rurales, devenant de plus en plus prégnant, en atteste l’augmentation du nombre de biens patrimoniaux mis en vente. La situation sociale des familles, ainsi que les difficultés à s’acquitter des droits de succession lorsque la valeur foncière augmente du fait de ce phénomène spéculatif, conduisent à des situations de dépossession de ces biens patrimoniaux.
Le CESEC de Corse estime que ce phénomène mérite dans l’urgence des mesures à droit constant. En effet l’outil fiscal préconisé ne sera effectif et opérationnel que lorsque le pouvoir fiscal sera transféré à la Collectivité de Corse. Compte tenu de la rapidité avec laquelle la situation évolue, le CESEC recommande à la Collectivité de Corse de réfléchir à des solutions d’urgence pour freiner cette tendance (un accompagnement des communes via leur pouvoir de préemption, le renforcement des moyens de l’Office foncier de la Corse…).
Le CESEC de Corse alerte sur les perspectives envisagées, notamment celles portant sur des adaptations législatives et réglementaires, et souligne le risque de permettre des contournements des protections existantes en matière de foncier agricole.
Le CESEC de Corse indique que la stratégie pour une politique de rénovation agraire ne saurait méconnaître et ne pas prendre en considération le phénomène spéculatif qui touche le foncier agricole.
Le CESEC de Corse rappelle qu’il est crucial de promouvoir un développement économique dynamique qui crée des emplois et réduit les inégalités. Un tissu économique solide peut offrir des alternatives légales et attractives aux activités criminelles, diminuant ainsi la tentation de rejoindre des réseaux mafieux. Le développement économique doit inclure des initiatives pour soutenir les petites et moyennes entreprises, encourager l'innovation et diversifier l'économie insulaire. Des politiques de formation professionnelle et d'insertion sur le marché du travail sont également nécessaires pour améliorer les qualifications et les perspectives d'emploi des habitants.
Le CESEC de Corse estime qu'un modèle économique équilibré doit également prendre en compte les efforts nécessaires pour lutter contre les fractures territoriales entre le rural et l'urbain. Cela inclut la présence des services publics en zones rurales, le soutien aux entreprises implantées dans ces territoires. Il est crucial de reconnaître ces entreprises comme « d'utilité publique » afin de défendre et préserver les savoir-faire métiers, les emplois, ainsi que l'accès aux biens et services, qu’elles apportent, indispensables au maintien des populations.
III : Drogues, commerces illicites
Propositions portées par le conseil exécutif de Corse
Le CESEC de Corse estime qu'une lutte efficace contre la drogue nécessite impérativement des données précises sur le trafic et la consommation, afin de mesurer l'ampleur du phénomène. À ce jour, ces données demeurent insuffisantes.
L'institut de référence pour établir les statistiques sur la consommation de stupéfiants en France est l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT). Cet organisme public indépendant collecte, analyse et diffuse des informations sur les drogues et les addictions, éclairant ainsi les politiques publiques et informant les professionnels du secteur ainsi que le grand public.
La fiche territoriale dédiée à la Corse, qui présente les indicateurs et leurs évolutions concernant les usages, les usagers (adolescents et adultes, hommes et femmes), la mortalité (nombre de décès, d’accidents de la route), les traitements de substitution aux opiacés et la répression (interpellations pour ivresse, infractions à la législation sur les stupéfiants), n’est pas récente. Elle a été mise à jour en 2021, sur la base de données datant de 2017.
Pour un engagement fort et total en faveur de la lutte contre la drogue, une coopération réelle et sérieuse entre les différentes parties prenantes, les autorités préfectorales, les forces de police, les douanes et les collectivités locales, est indispensable
Dans le domaine de la lutte contre les addictions, il est impératif que les pouvoirs publics augmentent significativement leurs investissements dans les centres d'addictologie. Une telle démarche permettrait d'améliorer de manière substantielle la prise en charge médicale et psychologique des personnes souffrant d'addictions à travers toutes les microrégions de Corse. En 2020, les centres d'addictologie de l'île ont pris en charge 769 personnes et réalisé 4088 consultations.
Cet investissement accru devrait également permettre d'augmenter les capacités d'accueil dans les programmes résidentiels ou de désintoxication intensive, qui sont actuellement limitées. En effet, les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) en Corse disposent d'une capacité d'accueil restreinte, souvent entre 10 et 20 places pour les programmes résidentiels.
En renforçant les infrastructures et les ressources humaines dédiées à ces centres, un soutien plus adéquat et plus accessible serait offert à ceux qui en ont le plus besoin, tout en réduisant les risques associés aux addictions.
IV : Dérives mafieuses : instruments d'analyse et de quantification / politiques et procédures pénales
Propositions portées par le conseil exécutif de Corse
Le CESEC de Corse souligne l'importance de réconcilier les citoyens avec la loi, qui doit demeurer le garant du vivre-ensemble. Il est impératif que l'État, dans l'exercice de ses compétences régaliennes, puisse agir avec transparence et probité, sans que sa capacité à intervenir soit mise en doute.
Enfin, le CESEC de Corse recommande que l'Université entreprenne une étude scientifique visant à évaluer les impacts de l'économie criminelle sur l'économie corse, afin de mieux comprendre et contrer ces phénomènes ; ainsi qu’une étude de type sociologique et anthropologique sur les phénomènes mafieux en Corse.
V : Enjeux éducatifs, culturels et sociétaux
Propositions portées par le conseil exécutif de Corse
Il souligne l'importance de demeurer vigilant afin de préserver et garantir la liberté de création. Il estime inopportun de porter un jugement préalable sur les contenus des œuvres, estimant que la créativité doit s'épanouir sans entraves ni censure anticipée.
Le combat contre la mafia est un combat de société qui se gagne à l’échelle d’une génération. Il est de la responsabilité collective de donner à la jeune génération tous les moyens de se construire, de s’insérer au niveau social, professionnel, sociétal, et lui permettre d’exercer sa citoyenneté de manière efficiente.
Le CESEC de Corse rappelle l’importance de mettre en œuvre les synergies visant à accompagner les jeunes générations vers des parcours d’excellence, tout au long des parcours scolaires en y adossant systématiquement les enseignements à la langue, à la culture et à l’histoire corses.
Le CESEC de Corse soutient les préconisations formulées visant à renforcer l’action éducative auprès des jeunes, leur inculquer des valeurs, leur permettre de développer leur esprit critique éveiller les consciences (déconstruire l’image du criminel héroïsé, dénoncer le culte des armes, faire tomber les stéréotypes,) pour les détourner de systèmes prédateurs.
Le CESEC de Corse considère que ces mesures doivent être renforcées par une meilleure implication des associations et des médiateurs culturels et éducatifs, par des actions à la citoyenneté (conseil des jeunes), des actions de prévention, y compris en milieu rural pour prévenir et lutter contre toutes les formes d’addiction, et de violences.
Les médias, les institutions éducatives et la société civile ont un rôle important à jouer dans la promotion des modèles vertueux pouvant inspirer la société et promouvoir des comportements positifs. Valoriser le travail, l'émancipation intellectuelle et la solidarité, peut contribuer à contrer l'influence des modèles criminels. Les histoires de réussite et les exemples de résilience peuvent servir de sources d'inspiration et de motivation pour les jeunes. La reconnaissance publique des contributions positives renforce également le sentiment d'appartenance et de fierté communautaire.
En conclusion,
La précarité économique tisse un terreau fertile pour la criminalité. Cette situation est exacerbée par une économie insulaire fragile, où les opportunités de travail sont rares et souvent mal rémunérées. La pauvreté et l'exclusion sociale augmentent le risque de marginalisation, rendant certains individus plus vulnérables aux influences criminelles et les amenant à adopter des comportements déviants.
Face à cette réalité, le CESEC de Corse rappelle qu'il est impératif de s'atteler à offrir un autre destin aux Corses, notamment à la jeunesse, en ouvrant des perspectives prometteuses et en les éloignant des tentations criminelles. En investissant dans l'éducation, la formation et la création d'opportunités, nous pouvons bâtir une société où chacun trouve sa place et contribue au bien commun.
Ce rapport est le signe d'un engagement collectif visant à faire passer le système mafieux d'une réalité occulte à une réalité manifeste. En parler, quelle que soit la sémantique utilisée, est déterminant pour sensibiliser la société et inciter les pouvoirs publics à se concerter et se coordonner pour agir. En témoigne le changement de comportement de l'État, qui se montre désormais plus disposé à coopérer après avoir initialement refusé de participer à différentes réunions de travail.
Encourager la transparence et le débat public est crucial pour briser la loi du silence et exposer les fonctionnements criminels. Une société informée et engagée est mieux équipée pour résister à l'emprise de la criminalité et pour soutenir les efforts de lutte contre celle-ci.
Le CESEC de Corse réaffirme son engagement à contribuer, par son action, ses travaux et ses réflexions, à accompagner la collectivité de Corse dans la définition des objectifs et des actions pour une Corse libre, apaisée et démocratique. Il émet un avis favorable au plan de lutte contre les dérives mafieuses et aux trente mesures proposées.
Le Président du Conseil exécutif de Corse a prononcé un discours en 2019, soulignant le risque de convergence entre criminalité organisée et institutions politiques et appelant à une action collective pour contrer ces dérives.
Une session spéciale de l'Assemblée de Corse dédiée aux dérives mafieuses a été organisée le 18 novembre 2022, débouchant sur une résolution solennelle affirmant la volonté de vivre dans une société libre et démocratique.
En application de cette résolution, la Commission Permanente de l’Assemblée de Corse a été réunie, dans un format dédié, élargi aux Présidents des groupes politiques, aux instances consultatives et à des représentants des collectifs et associations, pour mener un cycle d’auditions.
En complément de ces auditions, des ateliers de travail ont été engagés, organisés autour de cinq thèmes, selon une logique prévoyant la réalisation d’un état des lieux, l’identification de problématiques, la réalisation d’auditions et d’approfondissements, l’élaboration d’un livrable de synthèse.
- Ethique et politiques publiques
- Secteurs économiques particulièrement exposés
- Drogues, commerces illicites
- Dérives mafieuses : Instruments d’analyse et de quantification/ Procédure, droit et politique pénale
- Enjeux éducatifs, culturels et sociétaux
Le conseil exécutif de Corse, par ce rapport, propose un plan d’action global composé de trente mesures, réparties en cinq thématiques, dans des domaines relevant de ses compétences propres, de compétences partagées, ou ne relevant pas de ses compétences au terme du droit positif actuel.
Certaines propositions sont déjà en vigueur, d’autres peuvent intervenir sans délai sous réserve d’un vote favorable de l’Assemblée de Corse, les dernières ont vocation à être mises en œuvre ou expertisées et affinées dans le cadre de la poursuite des travaux.
L’objectif poursuivi et proposé est clair : construire une société corse démocratique, composée de femmes et d’hommes libres, vivant et travaillant en paix dans le pays qui est le leur.
Le CESEC de Corse, en tant que représentant de la société civile se félicite de constater qu’une mobilisation citoyenne organisée et pérenne s’est constituée contre la violence à caractère mafieux et trouve écho au sein de la société, des élus et des institutions.
Le CESEC de Corse loue le travail de la Collectivité de Corse qui a su prendre en compte un problème prégnant pour la société corse, salue cette initiative qui est sans équivalent (hormis en Sicile) et qui mobilise les institutions et l’ensemble du corps social.
La lutte contre les dérives mafieuses exige en effet un engagement et un investissement significatifs de la part de tous.
Le CESEC de Corse souhaite réaffirmer son engagement indéfectible pour contribuer à construire une société libre, démocratique et apaisée.
Le CESEC de Corse affirme également que pour permettre d’enrayer la criminalité organisée et ses violences, exercées par des groupes quels qu’ils soient relevant de la grande criminalité ou non, un développement économique et social, durable, juste et solidaire, où chacun trouve sa place, est une condition nécessaire, et son corollaire indispensable et primordial est le renforcement de la prévention, de l’éducation, de la formation et de la culture sans lesquels il n’existe pas de personnes émancipées, sensibilisées aux enjeux de la citoyenneté, des droits humains et des libertés fondamentales.
Le CESEC de Corse rappelle avoir pris une part importante dans la démarche initiée, à côté de la collectivité de Corse. Tout d'abord, en adoptant, en décembre 2022, une résolution relative aux dérives mafieuses qui affligent l'île, puis en participant activement aux travaux organisés dans les cinq ateliers mis en place par l’Assemblée de Corse.
L’adoption de ce rapport, loin d’être perçu comme un moment d’opportunité, marquera le début d’une mobilisation active et collective, qui s’inscrira dans le temps long avec le concours de tous, qui soit à la fois convaincante et réaliste, visant à surmonter le sentiment de fatalisme et de résignation qui pourrait habiter le peuple corse.
À la lumière des remarques et observations formulées lors de l’analyse des propositions présentées, le CESEC de Corse réaffirme avec force sa volonté de s'engager dans cette dynamique de co-construction d’un pays, d’un projet de société fondé sur des valeurs de liberté et de justice, voué à l’émancipation individuelle et collective et souhaite être étroitement associé aux travaux qui seront entrepris.
I : Éthique et politiques publiques
Les propositions portées par le Conseil exécutif de Corse
-Actions menées dans le cadre du contrôle des opérateurs externes et l’évaluation des politiques publiques
La lutte contre la mafia est un combat pour l’éthique et la transparence, une clé essentielle pour redonner confiance aux citoyens. Le CESEC de Corse salue les efforts réalisés dans ce domaine par la direction dédiée.
-Actions menées dans la cadre du contrôle interne
Le CESEC de Corse, consulté sur la stratégie d’achat public de la collectivité de Corse, a eu l’occasion de se prononcer sur les actions proposées.
En 2022, avec le Corsica Business Act et le schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER) 2023-2027, le CESEC saluait les bonnes intentions émanant de la collectivité, visant à faire de la commande publique un levier de dynamisation du tissu économique et un moteur de croissance pour les entreprises corses, tout en respectant scrupuleusement les règles de la commande publique. Il jugeait également utile et opportun d’accroître la visibilité et l’éthique de la commande publique, et d’allouer les moyens nécessaires pour en garantir le respect.
En 2024, lors de la révision du SPASER, le CESEC constatait les efforts accomplis et les données encourageantes concernant l’insertion des clauses sociales et environnementales, ainsi que les mesures facilitant l’accès à la commande publique pour les TPE/PME.
Le CESEC soulignait l’importance d’associer, au processus consultatif mis en place, les différentes organisations professionnelles, ainsi que, dans le cadre de l’ESS, l’Union des Employeurs de l’Économie Sociale et Solidaire (UDES). Il a également insisté sur la nécessité d’intégrer la démarche de « Responsabilité Sociétale des Entreprises », afin que les entreprises influencent positivement leur environnement interne et externe.
- Créer une charte éthique de l’élu(e) de la Collectivité de Corse
Le CESEC de Corse souligne l’importance de cette initiative.
Le CESEC de Corse entend que l’instance consultative spécifique, dont la création est proposée, permettra de recueillir et de traiter les alertes. Toutefois, il souhaite qu’une attention particulière soit accordée aux agents de la collectivité de Corse. Cela pourrait passer par des actions de formation, de sensibilisation et par le renforcement des moyens de protection, afin de les soutenir efficacement en cas de situation de signalement.
- Consolider l’information, fiabiliser les données et les rendre accessibles au public
- Créer une instance consultative spécifique : « Lutte contre les dérives mafieuses »
Le CESEC de Corse salue cette initiative et considère comme tout aussi déterminante toute autre perspective permettant de renforcer la participation citoyenne, notamment à travers des consultations citoyennes. Il est également crucial d'améliorer le niveau de conscience collective des responsabilités et des devoirs de chacun. Pour ce faire, il convient de réfléchir aux modalités de participation des citoyens à l’élaboration des politiques publiques à l’échelle des territoires, afin de renforcer la participation citoyenne et la vigilance collective (forums de discussion, consultations publiques, les campagnes de sensibilisation…)
- Concourir à la reconnaissance d’utilité publique des collectifs et associations de lutte contre les dérives mafieuses
- Donner mandat au Président du Conseil exécutif de Corse pour interroger l’AFA (Agence Française Anticorruption) sur le contenu d’une éventuelle mission de conseil
Le CESEC de Corse juge essentiel que le Conseil exécutif de Corse suscite l’aide de l’AFA pour marquer sa volonté de s’engager dans une démarche anticorruption.
- Donner acte au Conseil exécutif de Corse qu’il souhaite rendre public le rapport de l’AFA dès sa publication
Le CESEC de Corse considère que toute initiative qui permet d’améliorer l’information des citoyens est essentielle car de nature à mieux mesurer l’ampleur du phénomène et à adapter éventuellement les dispositifs mis en place.
II : Secteurs économiques particulièrement exposés
Le CESEC de Corse tient à souligner que, bien que certains secteurs d'activités soient particulièrement vulnérables aux dérives mafieuses, cela ne signifie pas que tous les acteurs économiques impliqués dans ces secteurs soient malhonnêtes. De nombreux entrepreneurs et travailleurs s’investissent avec probité et intégrité dans ces domaines, contribuant ainsi au développement économique et social de la région.
Ces acteurs économiques, par leur engagement et leur travail, jouent un rôle crucial dans la lutte contre les dérives mafieuses. Ils démontrent qu'il est possible de réussir et de prospérer sans recourir à des pratiques illégales. Il est donc essentiel de les soutenir, de les valoriser et de les protéger de toute pression ou destruction émanant de la sphère des bandes organisées afin de renforcer le tissu économique local et de promouvoir des modèles de réussite basés sur le respect des lois.
En reconnaissant et en encourageant ces efforts, nous pouvons créer un environnement où les activités mafieuses sont marginalisées et où les valeurs de travail et d'intégrité sont mises en avant. Cela contribuera à bâtir une société plus juste et plus résiliente, capable de résister aux tentations criminelles et de prospérer de manière durable.
Propositions portées par le conseil exécutif de Corse
- Garantir la prééminence de l’intérêt public dans le secteur de la gestion des Déchets
- Demander, à travers une adaptation règlementaire, l’introduction dans le code la commande publique la notion de “ bénéfice raisonnable ” dans les secteurs stratégiques, notamment la gestion des déchets, et en systématiser l’application
Le CESEC de Corse s’est prononcé sur la problématique déchet par un rapport d’auto saisine « Femu altrimente, contribution pour une gestion vertueuse et pratique des déchets ». Il rappelle son avis sur le PTPGD : il considère que si la notion de bénéfice raisonnable est vertueuse et de nature à limiter les profits, elle ne suffit pas néanmoins à soustraire la gestion des déchets à la seule logique du profit. Cette gestion doit impérativement s’accompagner d’un renforcement du tri à la source et de l’installation d’infrastructures de proximité, tel que cela est prévu dans le PTPGD.
- Créer une instance conjointe Etat/CDC en charge du suivi des permis de construire
Le CESEC de Corse soutient cette proposition. Par délibération, l’Assemblée de Corse a donné pouvoir au président du Conseil exécutif de Corse d’ester en justice sur les permis de construire et les documents d’urbanisme illégaux. Néanmoins, c’est la fonction régalienne de l’Etat que d’assurer un contrôle de légalité dans ce domaine ; la Collectivité de Corse veille, pour sa part, à la compatibilité de ces actes au PADDUC.
Le CESEC de Corse souhaite que l'État réponde favorablement à cette proposition de gestion partagée, cela permettra d'obtenir une vision complète des demandes de permis de construire, de disposer de capacités d'action, y compris en phase précontentieuse, voire de permettre à la collectivité de Corse d’avoir les éléments d'ester en justice dans les délais prévus aux côtés de l'État ou seule, si ce dernier ne souhaitait pas s'engager dans une telle démarche.
Il est rappelé à la mémoire du CESEC qu'en 2019, l'État n'avait pas donné suite à cette demande. Aussi, le CESEC de Corse s'interroge sur les conséquences d'un éventuel refus réitéré, et en particulier sur ce qui peut être envisagé dans ce cas au sein de la collectivité de Corse, notamment dans le cadre du suivi et de l’application du PADDUC. Le CESEC de Corse juge nécessaire la mise en place d'une instance de suivi de l'application des lois en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire sachant que le secteur de l’immobilier est exposé à des pratiques spéculatives qui peuvent entraîner des comportements mafieux.
Le CESEC de Corse reconnaît la nécessité de construire une relation apaisée avec l'État, les institutions et le corps social. La réponse de l'État à la création d'une instance conjointe telle que proposée sera un indicateur précieux pour évaluer ce niveau de confiance.
- Renforcer les aides financières de la Collectivité de Corse pour accompagner l’adoption des documents d’urbanisme
Le CESEC de Corse rappelle qu'à plusieurs reprises, dans ses avis, il a insisté sur la nécessité d'accorder une attention particulière à l'élaboration des documents d'urbanisme. Il préconisait également que les aides accordées aux communes et à leurs groupements soient conditionnées à l'adoption de ces documents.
- Mettre en place une fiscalité immobilière sur les opérations spéculatives
Le CESEC de Corse partage le constat selon lequel le phénomène spéculatif se déplace vers les zones rurales, devenant de plus en plus prégnant, en atteste l’augmentation du nombre de biens patrimoniaux mis en vente. La situation sociale des familles, ainsi que les difficultés à s’acquitter des droits de succession lorsque la valeur foncière augmente du fait de ce phénomène spéculatif, conduisent à des situations de dépossession de ces biens patrimoniaux.
Le CESEC de Corse estime que ce phénomène mérite dans l’urgence des mesures à droit constant. En effet l’outil fiscal préconisé ne sera effectif et opérationnel que lorsque le pouvoir fiscal sera transféré à la Collectivité de Corse. Compte tenu de la rapidité avec laquelle la situation évolue, le CESEC recommande à la Collectivité de Corse de réfléchir à des solutions d’urgence pour freiner cette tendance (un accompagnement des communes via leur pouvoir de préemption, le renforcement des moyens de l’Office foncier de la Corse…).
- Mettre en place de nouveaux outils, plus opérationnels, au service d’une politique de rénovation agraire
Le CESEC de Corse alerte sur les perspectives envisagées, notamment celles portant sur des adaptations législatives et réglementaires, et souligne le risque de permettre des contournements des protections existantes en matière de foncier agricole.
Le CESEC de Corse indique que la stratégie pour une politique de rénovation agraire ne saurait méconnaître et ne pas prendre en considération le phénomène spéculatif qui touche le foncier agricole.
- Construire un modèle de développement économique durable et équilibré
Le CESEC de Corse rappelle qu’il est crucial de promouvoir un développement économique dynamique qui crée des emplois et réduit les inégalités. Un tissu économique solide peut offrir des alternatives légales et attractives aux activités criminelles, diminuant ainsi la tentation de rejoindre des réseaux mafieux. Le développement économique doit inclure des initiatives pour soutenir les petites et moyennes entreprises, encourager l'innovation et diversifier l'économie insulaire. Des politiques de formation professionnelle et d'insertion sur le marché du travail sont également nécessaires pour améliorer les qualifications et les perspectives d'emploi des habitants.
Le CESEC de Corse estime qu'un modèle économique équilibré doit également prendre en compte les efforts nécessaires pour lutter contre les fractures territoriales entre le rural et l'urbain. Cela inclut la présence des services publics en zones rurales, le soutien aux entreprises implantées dans ces territoires. Il est crucial de reconnaître ces entreprises comme « d'utilité publique » afin de défendre et préserver les savoir-faire métiers, les emplois, ainsi que l'accès aux biens et services, qu’elles apportent, indispensables au maintien des populations.
III : Drogues, commerces illicites
Propositions portées par le conseil exécutif de Corse
- Faire de la lutte contre la consommation de drogues une grande cause nationale pour la Corse
- Etablir un partenariat avec les acteurs de la vie économique et sociale
- Inscrire la Collectivité de Corse dans un réseau partenarial international : le Forum européen pour la sécurité urbaine
- Une action ponctuelle emblématique : la lutte contre le protoxyde d’azote
Le CESEC de Corse estime qu'une lutte efficace contre la drogue nécessite impérativement des données précises sur le trafic et la consommation, afin de mesurer l'ampleur du phénomène. À ce jour, ces données demeurent insuffisantes.
L'institut de référence pour établir les statistiques sur la consommation de stupéfiants en France est l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT). Cet organisme public indépendant collecte, analyse et diffuse des informations sur les drogues et les addictions, éclairant ainsi les politiques publiques et informant les professionnels du secteur ainsi que le grand public.
La fiche territoriale dédiée à la Corse, qui présente les indicateurs et leurs évolutions concernant les usages, les usagers (adolescents et adultes, hommes et femmes), la mortalité (nombre de décès, d’accidents de la route), les traitements de substitution aux opiacés et la répression (interpellations pour ivresse, infractions à la législation sur les stupéfiants), n’est pas récente. Elle a été mise à jour en 2021, sur la base de données datant de 2017.
Pour un engagement fort et total en faveur de la lutte contre la drogue, une coopération réelle et sérieuse entre les différentes parties prenantes, les autorités préfectorales, les forces de police, les douanes et les collectivités locales, est indispensable
Dans le domaine de la lutte contre les addictions, il est impératif que les pouvoirs publics augmentent significativement leurs investissements dans les centres d'addictologie. Une telle démarche permettrait d'améliorer de manière substantielle la prise en charge médicale et psychologique des personnes souffrant d'addictions à travers toutes les microrégions de Corse. En 2020, les centres d'addictologie de l'île ont pris en charge 769 personnes et réalisé 4088 consultations.
Cet investissement accru devrait également permettre d'augmenter les capacités d'accueil dans les programmes résidentiels ou de désintoxication intensive, qui sont actuellement limitées. En effet, les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) en Corse disposent d'une capacité d'accueil restreinte, souvent entre 10 et 20 places pour les programmes résidentiels.
En renforçant les infrastructures et les ressources humaines dédiées à ces centres, un soutien plus adéquat et plus accessible serait offert à ceux qui en ont le plus besoin, tout en réduisant les risques associés aux addictions.
IV : Dérives mafieuses : instruments d'analyse et de quantification / politiques et procédures pénales
Propositions portées par le conseil exécutif de Corse
- Reconstruire le lien de confiance entre les Corses et l’institution judiciaire
- Présentation annuelle devant l’Assemblée de Corse de la politique pénale menée en Corse
- En matière de confiscation des biens
- Politique pénale
Le CESEC de Corse souligne l'importance de réconcilier les citoyens avec la loi, qui doit demeurer le garant du vivre-ensemble. Il est impératif que l'État, dans l'exercice de ses compétences régaliennes, puisse agir avec transparence et probité, sans que sa capacité à intervenir soit mise en doute.
Enfin, le CESEC de Corse recommande que l'Université entreprenne une étude scientifique visant à évaluer les impacts de l'économie criminelle sur l'économie corse, afin de mieux comprendre et contrer ces phénomènes ; ainsi qu’une étude de type sociologique et anthropologique sur les phénomènes mafieux en Corse.
V : Enjeux éducatifs, culturels et sociétaux
Propositions portées par le conseil exécutif de Corse
- Promouvoir une culture de la légalité et de la démocratie
- Création d’un prix « Citatinanza »
- Engager une réflexion sur l’impact de certaines œuvres et productions
- Mener un travail ciblé avec les associations et collectifs engagés dans la lutte contre les dérives mafieuses.
Il souligne l'importance de demeurer vigilant afin de préserver et garantir la liberté de création. Il estime inopportun de porter un jugement préalable sur les contenus des œuvres, estimant que la créativité doit s'épanouir sans entraves ni censure anticipée.
- Mobiliser les leviers de l’éducation et de la formation
- Partenariat stratégique avec l’Académie de Corse.
- Soutenir l’Università di Corsica dans sa volonté de s’engager dans des actions de mobilisation et de sensibilisation en faveur de la culture de la démocratie et contre les logiques criminelles et mafieuses
- Impliquer les autorités religieuses et spirituelles
Le combat contre la mafia est un combat de société qui se gagne à l’échelle d’une génération. Il est de la responsabilité collective de donner à la jeune génération tous les moyens de se construire, de s’insérer au niveau social, professionnel, sociétal, et lui permettre d’exercer sa citoyenneté de manière efficiente.
Le CESEC de Corse rappelle l’importance de mettre en œuvre les synergies visant à accompagner les jeunes générations vers des parcours d’excellence, tout au long des parcours scolaires en y adossant systématiquement les enseignements à la langue, à la culture et à l’histoire corses.
Le CESEC de Corse soutient les préconisations formulées visant à renforcer l’action éducative auprès des jeunes, leur inculquer des valeurs, leur permettre de développer leur esprit critique éveiller les consciences (déconstruire l’image du criminel héroïsé, dénoncer le culte des armes, faire tomber les stéréotypes,) pour les détourner de systèmes prédateurs.
Le CESEC de Corse considère que ces mesures doivent être renforcées par une meilleure implication des associations et des médiateurs culturels et éducatifs, par des actions à la citoyenneté (conseil des jeunes), des actions de prévention, y compris en milieu rural pour prévenir et lutter contre toutes les formes d’addiction, et de violences.
Les médias, les institutions éducatives et la société civile ont un rôle important à jouer dans la promotion des modèles vertueux pouvant inspirer la société et promouvoir des comportements positifs. Valoriser le travail, l'émancipation intellectuelle et la solidarité, peut contribuer à contrer l'influence des modèles criminels. Les histoires de réussite et les exemples de résilience peuvent servir de sources d'inspiration et de motivation pour les jeunes. La reconnaissance publique des contributions positives renforce également le sentiment d'appartenance et de fierté communautaire.
En conclusion,
La précarité économique tisse un terreau fertile pour la criminalité. Cette situation est exacerbée par une économie insulaire fragile, où les opportunités de travail sont rares et souvent mal rémunérées. La pauvreté et l'exclusion sociale augmentent le risque de marginalisation, rendant certains individus plus vulnérables aux influences criminelles et les amenant à adopter des comportements déviants.
Face à cette réalité, le CESEC de Corse rappelle qu'il est impératif de s'atteler à offrir un autre destin aux Corses, notamment à la jeunesse, en ouvrant des perspectives prometteuses et en les éloignant des tentations criminelles. En investissant dans l'éducation, la formation et la création d'opportunités, nous pouvons bâtir une société où chacun trouve sa place et contribue au bien commun.
Ce rapport est le signe d'un engagement collectif visant à faire passer le système mafieux d'une réalité occulte à une réalité manifeste. En parler, quelle que soit la sémantique utilisée, est déterminant pour sensibiliser la société et inciter les pouvoirs publics à se concerter et se coordonner pour agir. En témoigne le changement de comportement de l'État, qui se montre désormais plus disposé à coopérer après avoir initialement refusé de participer à différentes réunions de travail.
Encourager la transparence et le débat public est crucial pour briser la loi du silence et exposer les fonctionnements criminels. Une société informée et engagée est mieux équipée pour résister à l'emprise de la criminalité et pour soutenir les efforts de lutte contre celle-ci.
Le CESEC de Corse réaffirme son engagement à contribuer, par son action, ses travaux et ses réflexions, à accompagner la collectivité de Corse dans la définition des objectifs et des actions pour une Corse libre, apaisée et démocratique. Il émet un avis favorable au plan de lutte contre les dérives mafieuses et aux trente mesures proposées.