« Déclarons l’urgence climatique et écologique ! »


A l'invitation du Cesec, Isabelle Autissier, la Présidente du WWF France, a animé une conférence intitulée : "Notre Méditerranée, des enjeux environnementaux exemplaires". Le Président de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, en ouverture de la séance, a rappelé la volonté de la Corse d'apporter sa contribution à la lutte contre le réchauffement climatique



Monsieur le Président du Conseil exécutif de Corse,
Monsieur le Président du Cesec,
Madame la Présidente du WWF, chère Isabelle Autissier,
Mesdames et messieurs les membres du Cesec,
Mesdames, Messieurs,
 

Au nom de l’Assemblée de Corse, je vous souhaite la bienvenue dans notre ile, que vous connaissez bien et où vous êtes venue souvent. Je ne crois d’ailleurs pas me tromper en disant que c’est ici que votre engagement dans le WWF a commencé.
Nous sommes très heureux de vous accueillir car votre combat pour la protection de la Méditerranée et les messages que vous portez rejoignent notre engagement et nos préoccupations.
Aussi, je tiens à remercier le Président du Cesec, Paul Scaglia, et sa dynamique équipe d’avoir organisé cette conférence et ces échanges qui seront, je n’en doute pas, très instructifs pour nous, élus de la Corse. 
Vous le verrez au fil de mes propos, nous avons en Corse une conscience aigüe de la nécessité de préserver notre environnement, tant au niveau institutionnel que de la société civile. Vous n’êtes pas sans savoir que les nationalistes sont à l’origine de nombreux combats en la matière : je pense à l’affaire des boues rouges en 1972, qui a posé pour la première fois la question des dommages écologiques ; je pense aux essais nucléaires que la France voulait faire dans le massif de l’Argentella en 1960 et que la mobilisation populaire a permis d’éviter ; je pense aussi aux actions clandestines qui ont empêché durant quarante ans la bétonisation du littoral et dont les Corses, y compris ceux qui ne sont pas nationalistes, reconnaissent qu’elles ont été indispensables à la préservation de nos côtes. Je pense enfin à ce qui a constitué, en quelque sorte, le berceau du nationalisme, c’est-à-dire le monde agricole et rural. Cette agriculture et cette ruralité qui ont donné aux Corses de nombreux savoir-faire mais aussi un savoir-être face à la nature, une certaine sensibilité à la défense de l’environnement.
Pour autant, je ne porterai pas ici un discours angélique qui consisterait à dire que nous avons fait suffisamment et que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Oui, nous avons beaucoup fait par le passé mais, malheureusement, la Corse n’a pas échappé à la mondialisation, au phénomène de consommation excessive et à la transformation de la société qui s’est opérée partout à travers le monde. Et notre environnement particulièrement préservé, l’écrin dans lequel nous vivons, se dégrade à mesure que notre mode de vie évolue. Celui-ci est devenu plus citadin, très consommateur d’énergie, très générateur de déchets, très polluant en définitive.
La Corse se doit donc d’agir, pour elle-même bien entendu, mais aussi pour apporter sa contribution, même modeste, à la lutte contre le réchauffement climatique. La COP 25, qui se terminera demain, est une superstructure, certes nécessaire, mais dont nous pensons que l’on ne doit pas tout attendre. Nous sommes persuadés que chaque peuple – qu’il compte quelques centaines de personnes ou des millions – doit être artisan de cette lutte. Et si chacun, séparément, individuellement, ne prend aucune initiative, alors rien ne change.
Vous l’aurez compris, nous ne saurons nous y résoudre.
Alors, s’il est difficile de savoir précisément par où commencer, nous pensons que des solutions existent et qu’elles doivent rapidement être mises en œuvre.
Pour notre part, nous avons proposé de marquer symboliquement la mobilisation de la Corse par une déclaration de l’état d’urgence climatique et écologique, comme l’ont fait de nombreux pays régions et villes au cours de l’année 2019 et comme l’a fait le Parlement européen à la fin du mois dernier.
Prochainement, je présenterai devant l’Assemblée de Corse un rapport intitulé « Déclarons l’urgence climatique et écologique ! ». C’est, selon nous, un enjeu prioritaire que de reconnaître officiellement, au plus haut niveau des institutions de la Corse, l’impact croissant de l’Homme sur l’environnement. Il s’agit là d’un acte politique. A mon sens, les Corses ne comprendraient pas que notre collectivité ne fasse pas cette déclaration alors même que des régions françaises ayant beaucoup moins de compétences l’ont fait.
Déclarer l’état d’urgence climatique et écologique n’est pas une fin en soi. Pour autant c’est une première séquence, comme une prise de conscience. C’est le premier pas, le déclencheur vers la mise en œuvre de solutions techniques favorisant la réduction de l’impact de l’action de l’Homme sur la nature. En effet, au-delà de la déclaration, il me semble indispensable que la Collectivité de Corse et tous ses organes « satellites » puissent s’engager dans une conférence sur l’urgence écologique et climatique réunissant les institutions, la société civile, les universitaires, les chercheurs, les associations, les syndicats et les acteurs économiques. A notre sens, la question du changement climatique se pose de manière transversale. L’enjeu est trop important pour que l’on continue d’agir par secteur : urbanisme, agriculture, énergie, social…Clairement, la préservation de l’environnement doit percoler dans toutes les orientations et dans toutes les politiques que nous mettons en œuvre. Le chantier est colossal mais nous serions irresponsables si nous ne le conduisions pas. D’autant que, je ne vous l’apprends pas, les scientifiques ont démontré qu’en Méditerranée, les impacts du changement climatique sont encore plus visibles qu’ailleurs.
Votre présence aujourd’hui constituera donc, je n’en doute pas, un apport considérable à notre réflexion et surtout à nos actions futures.
 
À ringrazià vi.


Rédigé le Jeudi 12 Décembre 2019 modifié le Jeudi 12 Décembre 2019

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